Mes ressources ? Les voisines !

Un projet qui répond de manière collective et en réseau à une problématique bien réelle : l’isolement et la surcharge physique, mentale et financière accrue des parents célibataires.

L’organisation de l’habitat détermine bien plus que ce que nous imaginons le style de vie que nous menons. La majorité d’entre nous vit dans ses 4 murs (en béton, merci Holcim), en famille nucléaire, en couple ou seul. Chaque logement est complétement équipé et ainsi personne n’a besoin de côtoyer ses voisins pour faire à manger ou se doucher. Chacun chez soi… et on ne traine pas dehors

Mais cet habitat individualisé, s’il peut convenir à certains, est aussi source de ségrégations et alourdit la vie quotidienne pour d’autres.C’est en particulier le cas pour les parents célibataires, qui sont le plus souvent des mères ! Elles se retrouvent seules à gérer le quotidien, à faire face aux imprévus, à devoir jongler entre activités professionnelles et familiales, avec un risque important d’isolement social. De plus, le loyer pèse de plus en plus lourd sur le budget de ces familles. La précarité financière, sociale et culturelle est le lot de trop d’entre elles. 

L’Association « RaFu » cherche depuis plusieurs années à pallier à ces difficultés grâce à un projet d’habitat collectif de mères élevant seules leurs enfants. Susciter ainsi l‘entraide, l’échange de compétences et de savoirs, l’organisation d’activités collectives, le soutien mutuel. Ce projet se veut aussi ouvert sur l’extérieur et doit permettre de lutter contre la précarité et l’isolement. 

Après bien des efforts, les membres de l’Association RaFu ont trouvé de quoi initier la mise en ?uvre de ce projet. Un immeuble qu’elles ont petit-à -petit occupé de femmes, dont la plupart élèvent seules leurs enfants. Carole, membre de l’association RaFu « En 3 ans, l’immeuble composé de 7 appartements est habité par 11 femmes et 6 enfants. Un climat d’entraide s’y est installé, le jardin collectif permet de créer un espace de rencontres informel, dans le sous-sol, des espaces collectifs ont été aménagés. Mais les loyers, bien que raisonnables, sont trop élevés pour permettre à 3 mères célibataires de sortir de l’aide sociale et acquérir leur autonomie financière. »

Comment s’organise l’entraide et quelles sont les tâches qui peuvent être partagées ? Carole répond : “ Ce sont les enfants qui profitent pleinement de ce type d’habitat, surtout les enfants uniques qui apprennent les notions de partage. Ils se retrouvent dans une dynamique qui ressemble presque à celle d’une famille nombreuse. Ils peuvent circuler d’étages en étages, vont manger, jouer, dormir, les uns chez les autres. C’est très enrichissant ! Pour les mères, le principal avantage est la flexibilité. Il est très facile de s’organiser afin de s’éclipser quelques heures, à n’importe quel moment de la journée. En soirée, si un spectacle, un entraînement sportif ou un travail dans un bar se profilent, il suffit d’installer un babyphone et le déposer chez l’une d’entre nous qui reste à la maison. Il n’est plus nécessaire d’organiser une baby-sitter qui peut également peser lourd dans le budget, ou solliciter les grands-parents, qui pour la plupart d’entre nous vivent à plus d’une cinquantaine de kilomètres de Bienne…L’enfant peut dormir dans sa propre chambre, plus besoin de faire un sac avec ses affaires, de l’amener ou de le rechercher. Cela évite une grande charge mentale ! De plus, étant donné que nous rencontrons toutes plus ou moins le même type de problèmes, il est plus facile pour nous d’en parler, de partager nos expériences, nos stratégies, et nous bénéficions de l’écoute et de la compréhension des unes et des autres. C’est très réconfortant !”

Un des objectifs poursuivis par l’association est de permettre à ces mères de sortir de la précarité financière qui signifie être bénéficiaire de   l’aide sociale. Et pour cela, le loyer (charge incompressible à moins de déménager) a une grande importance, c’est souvent ce poste du budget qui mène à la dépendance financière C’est ce que l’association n’a pas encore réussi à concrétiser. Se voir confier un immeuble en contrat de confiance et avec des loyers bas et en contrepartie l’entretenir et le faire vivre dans le quartier. Carole : 

“ Nous avions trouvé, il y a quatre ans, une énorme maison abandonnée qui appartenait aux Immeubles de la Ville de Bienne. Nous leur avions soumis notre projet, et on ne nous a jamais répondu. Cela a été une énorme déception pour nous. Le projet initial prévoyait de faire vivre le lieu avec des activités culturelles, artistiques, familiales, des brunchs. Chacune d’entre nous souhaitait organiser des événements en lien avec son propre domaine de compétences, tels que goûters philosophiques pour les enfants, après -midi « jam » ou spectacles et ateliers de cirque pour parents et enfants. Et tou.te.s ceux et celles qui le souhaitaient pouvaient également proposer leur propre animation. Nous voulions créer un lieu d’échanges dont tout le monde pouvait profiter, et à prix libre. Offrir des activités sociales et culturelles, sans but lucratif, était notre argument pour pouvoir bénéficier d’une maison au loyer très bas ».

Ce projet pourrait inspirer bien des architectes et promoteurs immobiliers. Créer des espaces habitables en fonction non pas de la rentabilité, mais qui se basent sur les besoins diversifiés des populations. Par exemple un immeuble dont un étage entier serait réservé à des familles monoparentales et aménagé d’une manière de favoriser les échanges entre les locataires. Avec pourquoi pas une salle de jeu sur l’étage, transformable facilement en salle de réunion avec un coin cuisine pour les apéros et un coin bibliothèque pour adultes et enfants et dans laquelle chacun.e pourrait mettre ce qui peut être utile à tous ? Ce type de projet immobilier profiterait non seulement aux familles monoparentales dans une précarité financière et sociale mais également à toutes les autres personnes en manque de lien et de sens.

Claire Magnin, comité de rédaction.

Qui a connaissance d’un immeuble ou d’une maison qui serait idéal pour ce projet, peut contacter l’association RaFu : rafubienne@gmail.com ou au 0774726298 (Carole)