Touche pas à ma bulle !
La bulle, c’est l’intégrité, c’est ce qui nous définit et nous protège. La violence domestique peut faire éclater cette bulle. Solidarité femmes Bienne et région accompagne les femmes et les enfants qui ont besoin de recréer leur bulle.
Ma bulle, c’est cet espace autour de moi qui contient mon corps, mon bien-être, mon intégrité, ma personnalité et mes idées. Les bulles sont capables de se déformer dans un courant d’air et de reprendre leur forme sphérique une fois au calme, mais elles sont aussi extrêmement fragiles et vulnérables. Ce qui pique, coupe ou tape risque de les faire éclater. En (re)créer une nouvelle est un exercice délicat qui peut prendre du temps.
Les femmes et les enfants concerné·e·s par la violence domestique sous toutes ses formes peuvent demander un soutien à Solidarité femmes Bienne et région, centre LAVI qui comprend un centre de consultations et une maison d’accueil. La Loi sur l’aide aux victimes d’infractions définit ainsi le terme de victime à l’article 1 : « Toute personne qui a subi, du fait d’une infraction, une atteinte directe à son intégrité physique, psychique ou sexuelle ». La bulle des femmes et des enfants qui s’adressent à Solidarité femmes a souvent éclaté. Pour pouvoir en recréer une, il s’agit en premier lieu de se mettre en sécurité et à l’abri de toute nouvelle violence.
La maison d’accueil de Solidarité femmes, un espace pour recréer sa bulle
Les femmes et les enfants arrivent à la maison d’accueil avec parfois encore l’odeur de la peur sur la peau. Un petit garçon croit voir des crocodiles partout, un autre panique lorsqu’il entend une voix d’homme. Entendre son père menacer de tuer sa mère sème l’effroi et le chaos dans les émotions des enfants, et le chemin pour retrouver la confiance peut s’avérer long et douloureux. Des animations sont proposées aux enfants qui logent dans la maison d’accueil. Ces moments sont comme de petites bulles où ils et elles peuvent penser à autre chose et renouer avec leurs activités d’enfants : jouer, créer, interagir et découvrir.
Pendant ces pauses, les mères peuvent elles aussi commencer à reconstruire leur bulle. Chercher un nouveau logement qui sera un espace sécure, entamer les démarches pour que soit réglée la nouvelle vie sans l’auteur des violences, mettre en place les mesures de sécurité nécessaires. Mais aussi prendre le temps de réaliser ce qu’elles ont enduré lorsqu’elles étaient si occupées à trouver des stratégies de survie. Certaines décident de donner une nouvelle chance à la relation.
Celles qui poursuivent leur chemin de combattantes bravent de nombreux obstacles. Dans la maison d’accueil, les femmes partagent leur expérience et s’encouragent entre elles. Elles s’étonnent souvent de voir avec quelle rapidité leurs enfants retrouvent leur joie de vivre. Pour elles, retrouver la sérénité et la stabilité qui leur permettra de poursuivre leur vie sans violence nécessite plus ou moins de temps, avec des hauts et des bas.
Dans sa « stratégie cantonale pour l’aide aux victimes », le canton de Berne imagine une solution plutôt consternante pour répondre au nombre croissant de demandes d’hébergements sécurisés qui est observé à l’échelle nationale : il vise une réduction de la durée des séjours, ceci afin de protéger la sacro-sainte « neutralité des coûts ». Mais il oublie que vouloir réaliser des économies sur le temps nécessaire pour assurer une sécurité suffisante et à recréer une bulle plus ou moins ronde risque de coûter bien plus cher à la société, avec des répercussions sur de nouveaux séjours en maison d’accueil ou des difficultés psycho-sociales à long terme pour les femmes et les enfants. Ces personnes en situation de vulnérabilité doivent pouvoir bénéficier de l’engagement clair de nos autorités pour une tolérance zéro face aux violences domestiques. Touches pas à ma bulle !
Texte:
Aurélie Landry travaille depuis 16 ans pour la maison d’accueil de Solidarité femmes. Elle est coordinatrice de l’équipe des collaboratrices de la maison d’accueil.
Photo :
Noémie Auderset
Contact : Solidarité femmes Biel/Bienne et région, www.solfemmes.ch, tél. 032 322 03 44, mail info@solfemmes.ch, ou permanence téléphonique des maisons d’accueil du canton de Berne « AppElle ! » 24h/24, tél. 031 533 03 03.