L’initiative pour un congé parental cantonal a été lancée, à l’initiative du PS. Cette initiative pose des questions : pourquoi cantonal, quel financement ? pour qui et pour combien ? Marie Moeschler, conseillère de ville répond à ces questions.
Qui est à l’initiative de « l’initiative cantonale pour le congé parental » ?
Dans le canton de Berne, l’initiative a été prise par le PS. Après le 14 juin 2019, où plus de 2 millions de personnes ont défilé dans la rue, le PSS a lancé un questionnaire adressé à la population en général, afin qu’elle s’exprime sur ses préoccupations et ses revendications prioritaires. Environs 800 personnes ont répondu à ce questionnaire. Les besoins principaux exprimés ont été le congé parental et l’égalité salariale. Un comité d’initiative cantonal pour un congé parental a été créé dans le canton de Berne à l’initiative du PS Berne dans la foulée.
Cette initiative est lancée au niveau cantonal. Comment avez-vous envisagé la question du financement ?
La question du financement est effectivement le nerf de la guerre. Mais nous avons trouvé le financement pour des avions de combat, pourquoi ne pourrions-nous pas trouver un financement pour les nouvelles familles dans le canton de Berne ? Il y a différentes possibilités qui ont été envisagées mais le texte de l’initiative fixe les grandes lignes et laisse le soin au grand Conseil et au Conseil Exécutif de régler les détails de sa mise en œuvre. A mon avis il pourrait très bien être financé via les allocations perte de gain. Cette solution permettrait un financement en fonction du salaire de chacun.e, donc socialement équilibré.
Pour le congé paternité les APG ont été augmenté de 0,05 points pour 2 semaines de congé. Pour les 24 semaines de congé parental, on peut s’imaginer alors qu’il faudrait les augmenter de 0,6points ou trouver une autre source de financement parallèle comme par exemple, la TVA. La commission fédérale pour les questions familiales soutient le congé parental car il favorise notamment le retour au travail des femmes, avec comme corollaire des rentrées fiscales supplémentaires. Une partie de ces rentrées fiscales supplémentaires pourraient aussi servir à payer une partie des coûts engendrés par un congé parental.
Avez-vous pu évaluer le nombre de familles concernées chaque année par un congé parental ?
Concernant le nombre de familles concernées : toutes les générations futures dès son entrée en vigueur ! Mais j’ai aussi fait un petit calcul à partir des statistiques : sur 1000 habitants il y a 9,6 naissances dans le canton de Berne et sachant que nous sommes 1’036’474 personnes à fin 2019, nous pouvons extrapoler : le congé parental s’appliquerait pour 9000 à 10’000 naissances par année. Au niveau fédéral et selon les discussions sur le congé paternité, on compte environ 80’000 nouveaux parents par an.
Comment vous est venue l’idée d’avancer sur cette question en lançant des initiatives au niveau cantonal ?
Je pense qu’après le débat autour du congé paternité aux chambres, qui a été très dur, (nous avons dû accepter 10 jours au lieu de 20), le parlement suisse et la majorité de la population suisse ne sont pas encore prêts à soutenir un congé parental. En revanche, les cantons peuvent montrer l’exemple comme on l’a vu avec les revendications qui ont pu être obtenues grâce à des initiatives cantonales, telles que l’AVS ou le droit de vote des femmes.
Comment se passe la récolte de signatures ?
Actuellement nous sommes en pleine pandémie et la récolte de signatures est interdite depuis le 18 décembre 2020 et jusqu’à fin janvier 2021dans le canton de Berne. Entre les mois de septembre et novembre, en adoptant les bonnes mesures de protection, nous avons plutôt été bien accueilli.es par les gens, dans la rue. Mais nous avons aussi entendu des remarques telles que « cette demande vient beaucoup trop tôt après le congé paternité » ou « nous n’avons pas besoin de vacances supplémentaire ».
Comment se règlera le congé parental pour les parents adoptifs ? Et pour les familles arc-en-ciel ? Et celles monoparentales ?
Le texte de l’initiative qui n’est que rédigé dans ses grandes lignes n’en fait pas mention. A titre personnel, j’aurais souhaité que ces thèmes soient inclus dans l’initiative cantonale bernoise afin de montrer un signal clair d’une volonté d’inclusivité et d’égalité en droits pour tous.tes.
Concernant les adoptions, à mon avis, il serait particulièrement souhaitable que les parents adoptifs soient inclus dans ce congé parental. Actuellement, un congé pour adoption fait défaut au niveau fédéral.
En ce qui concerne les familles monoparentales, je pense, que la problématique est beaucoup plus large. Par exemple, actuellement, des mères célibataires ne bénéficient même pas d’un congé maternité, car pour en bénéficier il faut avoir été assurée obligatoirement au sens de la LAVS durant les neuf mois précédant l’accouchement et avoir effectué une activité lucrative d’au moins 5 mois dans cette période. Toutefois, si le congé parental leur était applicable, cela réparerait en partie cette discrimination.
Concernant les parents arc-en-ciel, la question est également beaucoup plus large. Je partage l’opinion qui propose de supprimer la notion de genre dans le droit et les lois. C’est ainsi que nous pourrons éliminer les discriminations, notamment en matière de droit de la famille, en parlant de parents ou de partenaires et non plus de père ou mère ou d’époux et épouse.
Au final, les parents sont les parents et le cadre légal devrait accepter et tenir compte de toutes les situations sans discrimination aucune.
Une telle initiative a-t-elle été lancée aussi dans d’autres canton ?
À Zürich, à Bâle, dans le canton de Vaud, à Genève, des mêmes projets sont en train de se dessiner. Et d’autres cantons vont aussi s’y mettre. Le congé parental fait partie des revendications prioritaires des nouvelles générations.
Avez-vous d’autres choses à rajouter ?
Le congé paternité de 10 jours ne soulage pas vraiment les femmes et ne permet pas aux pères d’établir un réel lien avec le nouveau-né.24 semaines supplémentaires seront-elles, un réel progrès. Nous respecterions les recommandations de 36 semaines de congé parental préconisées par l’Union européenne et la Commission fédérale des questions familiales. De plus un tel congé permettrait une meilleure répartition des tâches ménagères et éducatives et répondrait au modèle familial souhaité par bon nombre de parents aujourd’hui
congé parental
Envie de faire un pas important pour l’égalité ? L’initiative peut être signé encore jusqu’au 1er avril 2021. Au vu des difficultés dues à la pandémie, un effort supplémentaire doit être fait pour que les 15.000 signatures nécessaires puissent être récoltées.