En ville, les restrictions sont nombreuses. Malgré tout, le service des espaces verts de la ville mise en priorité sur les arbres lorsqu’il s’agit de rendre Bienne plus verte. Rien n’est plus efficace à l’heure du changement climatique. Roger Racordon, responsable des infrastructures à la Direction des travaux publics, de l’énergie et de l’environnement à Bienne, explique pourquoi, parle des plus grands défis et de l’importance de la recherche sur les arbres, et donne un aperçu des nombreuses heures et francs investis dans chaque arbre.
Quelle quantité de végétation serait utile à la ville de Bienne pour lutter contre le changement climatique ?
Le dérèglement climatique est une triste réalité dont les conséquences se font cruellement sentir depuis quelques temps déjà. Notre service l’observe depuis une dizaine d’années au vu des essences méditerranéennes qu’il est à présent possible de planter dans nos régions. La ville de Bienne a actuellement un climat apparenté à celui de la ville de Montpellier il y a 50 ans. Tous les spécialistes s’accordent sur le fait qu’une augmentation massive de végétation peu aider à en réduire les effets néfastes.
Qu’est-ce qui est entrepris dans ce sens ?
Avec son importante masse foliaire, l’arbre joue un rôle particulièrement important – réduction du rayonnement solaire, diminution de la température, augmentation du taux d’humidité par évapotranspiration du feuillage, fixation des poussières – et devient une priorité absolue à nos yeux. L’arbre est également une plante-hôte pour divers animaux (insectes, oiseaux, rongeurs) et végétaux (gui, mousses, lichens). En parallèle, le dégrappage des revêtements imperméables et leur aménagement soucieux d’une grande biodiversité – prairies maigres et fleuries, arbustes et plantes vivaces indigènes – tout comme la transformation d’espaces verts existants en milieux extensifs plus proches de la nature sont les compléments indispensables pour une mise en réseau à l’échelon urbain.
Combien de services municipaux et d’employés se dédicacent pour davantage de végétation ?
Actuellement se sont environs 45 professionnelles, paysagistes, horticulteurs, arboristes et agriculteurs qui se soucient de l’entretien des espaces verts publics et des cimetières. La conduite et l’administration du service représente 6 à 7 personnes supplémentaires. On peut préciser qu’outre les travaux d’entretien des parcs et des promenades, des terrains de sports, des abords des écoles, des places de jeux et des milieux naturels protégés, de nombreux autres services sont impliqués dans la conception de nouveaux aménagements. Le Service des immeubles comme propriétaire des terrains en patrimoine financier, l’Urbanisme en charge de leur affectation, l’Office des bâtiments, le Génie civil et les Espaces verts pour les projets d’étude et de réalisation.
Quels sont les plus grands défis pour le service municipal des espaces verts ?
Le choix des végétaux les mieux adaptés au phénomène de réchauffement et de sécheresse sont le challenge principal. S’y greffe la problématique des besoins en eau et un personnel très sollicité à tous égards. Le passage à un entretien différencié, voir extensif, fait apparaître une problématique presque inconnue auparavant, à savoir l’apparition et l’extension des plantes envahissantes, dites néophytes invasifs. La lutte, exclusivement manuelle, représente un défi de taille presque insurmontable en termes de personnel et de moyens.
La constante augmentation des surfaces vertes en relations avec les projets en cours nécessite un entretien à long terme par des professionnels de la branche verte, ce qui est trop souvent sous-estimé par le quidam. Les aménagements naturels nécessitent observations et interventions ponctuelles réparties sur l’ensemble de l’année qui ne sont pas à négliger, puisque au moins aussi conséquentes, voir supérieures à celles d’un aménagement dit « classique ». Avec les conséquences financières et le personnel supplémentaire qui en résultent.
Combien d’arbres sont plantés chaque année à Bienne ?
Environs 60-70 arbres existants sont remplacés chaque année en raison de leur état sanitaire ou pour des raisons de sécurité. Le cadastre des arbres situé sur le domaine public, établis il y a 5 ans, est d’environ 8500 exemplaires. A ces chiffres, on peut déduire qu’en moyenne, un arbre en ville de Bienne à une espérance de vie d’une centaine d’année. S’y rajoute annuellement 50 à 60 nouveaux emplacements suites aux aménagements réalisés.
Quel est le prix d’un arbre nouvellement planté ?
Son prix est fonction de l’espèce choisie (feuillu/résineux) de sa vitesse de croissance (lent/rapide), de son type de multiplication (semis, bouture, marcotte, drageon, greffage), de la grandeur désirée à la plantation, de sa provenance. On peut convenir d’une moyenne de CHF 2’000.-/pce. S’y rajoute l’entretien, particulièrement intensif dans les premières années en place : contrôle des tuteurs et attaches, arrosage pendant 3-4 ans en périodes sèches, taille de formation annuelle durant 15-20 ans si situé en bordure de chaussée en vue d’assurer le gabarit d’espace libre nécessaires aux véhicules (bus, camions, caténaires, panneaux et feux de signalisation). Par la suite, l’entretien se limite à l’enlèvement du bois mort, à une taille d’allègement éventuelle, au maintien du gabarit selon son emplacement.
Des recherches sur les arbres sont-elles également effectuées ?
C’est selon nous un « élément-clé » pour la réussite d’une végétation luxuriante, saine et durable.
La connaissance des végétaux et de leur milieu naturel nous donne de nombreuses informations quant à leur capacité de s’intégrer, de se développer, de « survivre » dans un climat de plus en plus changeant, voire hostile. Notre service compte actuellement 4 collaborateurs affectés aux soins des arbres. Echanges, séminaires, essais et tests font partie de la formation continue des collaborateurs et responsables.
Que peuvent faire les habitants pour que l’environnement se porte mieux et comment ?
ou locataire, le particulier devient un « partenaire» déterminant pour la mise en réseau des espaces végétalisés en ville. Il est actif comme « aménagiste privé » soucieux de la biodiversité et du développement durable dans son jardin. Également à titre d’exemplarité, par son comportement dans l’espace public et sa participation et son engagement dans certains projets en cours, p.ex. lors de procédé participatif dans le cadre des projets de revalorisation des quais de la Suze au centre-ville et du réaménagement du centre-Mâche/rue Arthur-Villars.
Comment voyez-vous l’évolution de ces dix dernières années en matière de végétalisation à Bienne ?
Ces dernières années, on observe une réelle prise de conscience des phénomènes climatiques qui nous préoccupent de la part du public et au sein de l’administration. Concepts, projets, aménagements, entretiens ainsi qu’autorisations dans le cadre des permis de construire s’appuient sur les connaissances les plus récentes dans leur travail, avec des répercussions positives reconnues et appréciées par une grande majorité. On peut parler d’un véritable changement de paradigme qui a lieu actuellement.
Comment imaginez-vous Bienne dans les dix prochaines années et quel sont vos souhaits ?
Une coexistence, mieux une symbiose entre ses habitants et leurs divers besoins. Un lieu où il fait bon vivre et où la nature a son mot à dire et toute sa place.
Biodiversité en ville :
Dans le cadre de son plan d’action pour la biodiversité, la Ville de Bienne offre dix conseils gratuits par année. Inscription à l’adresse : environnement@biel-bienne.ch
plus d’information sur:
www.biel-bienne.ch/fr/details.html/29/news/3749/newsarchive/1
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Interview :
Lara Mina Christ est née à Bienne et écrit depuis l’âge de 25 ans des textes journalistiques.
Photo :
Roger Racordon, responsable des infrastructures à la Direction des travaux publics, de l’énergie et de l’environnement à Bienne.