Telle était ma devise tout au long de ma vie d’adolescente et de jeune adulte… Déjà à l’époque cette conscience que le monde partait en vrille, que ce n’était pas humain d’être destiné à travailler pour consommer, que quelque chose n’allait pas, ne résonnait pas… une forme de stérilité cérébrale régnait sur moi. Je résistais à la pression sociale à 25/28 ans… « alors quand est-ce que tu fais des enfants ? » … tant que je ne sens pas que la situation dans laquelle je vis me le permet… quitte à attendre longtemps et que la date de préemption soit passée… tant pis.
Je suis interpellée par les réactions de beaucoup de jeunes de nos jours qui décident et font ce qu’il faut pour s’assurer que lorsque l’horloge biologique viendra sonner à leur porte, ils ne changeront pas d’avis… oui, c’est vrai, on ne peut maintenant plus jouer à l’autruche, les choses ne se sont pas améliorées depuis mes jeunes années…
Le temps a passé, imperceptiblement, avec des rencontres importantes, je me suis laissée amadouer. J’ai fini par oser reprendre confiance… j’ai fini par accepter que ce serait quand même possible et j’ai enfin répondu à cet appel du plus profond de moi, me transportant au-delà de mes peurs. Le miracle de ces 4 enfants, dont 3 sont encore avec nous et qui tentent de tracer leur chemin sur des terres devenues désormais soit trop sèches, soit trop boueuses, tumultueuses et incertaines… parfois pleines de haine.
Et maintenant ?
Comment mes enfants voient ils le monde ? quel futur pour eux… est ce que c’était encore le dernier moment pour encore oser avoir des enfants ? auront-ils eux-mêmes des enfants ? Pourront-ils encore vivre le privilège de pouvoir transmettre leur amour et amener des êtres innocents dans un monde qui semble si noir et sans espoir ?
Mes parents disaient déjà que ce que devenait le monde était inquiétant et qu’il faudra apprendre à se battre… qu’un jour on devrait payer l’air qu’on respire… on n’en est pas si loin…
Pourtant, chaque génération semble avoir ses propres batailles à mener pour survivre et pour la première fois, cette génération doit s’engager pour la survie de l’humanité toute entière.
On entend depuis toujours les générations précédentes dire : « c’était mieux avant » « mais où va -t- on ? » « Ah, ces jeunes… » … Alors on en est où, véritablement, dans ce monde de fous ?
Autant de questions que se posent de potentiels futurs parents autour de moi… les parents et si on en parlait ? si on essayait ensemble de mieux accompagner nos jeunes ?
La sensation, la conviction, que je préfèrerai ne pas avoir sont pourtant bien là, elles ne me lâchent pas… On est arrivé au point de non-retour, il va falloir agir… Mais comment ?
Grâce à la venue des enfants dans ma vie, j’ai dû guérir, panser mes blessures pour ne pas qu’elles perdurent… continuer à transmettre les lourds fardeaux passés de génération en génération n’était et n’est plus une option… Après avoir moi-même tant souffert des conséquences de l’inconscience et de l’insouciance générale des années 70.
Pourtant tout semble avoir un sens… les choses évoluent et changent quand même… avec chaque horreur, une belle chose apparaît malgré tout, tant que l’on sait regarder la vie vraie, bien s’entourer, s’écouter… donner aux transformations la chance de se faire.
Le plus grand défi d’apprendre à s’aimer continue à régner toujours et encore. S’aimer profondément, sans retomber dans l’enfance, la dépendance… Comment redonner aux humains blessés ce dont ils ont manqué cruellement étant enfants ? Sans socle familial ou sociétal sécurisé l’autonomie restera précaire… c’est une loi universelle pour chaque être vivant…
Je me suis dirigée depuis longtemps vers des activités d’accompagnements, car plus rien d’autre ne semble faire sens à mes yeux que de continuer à œuvrer dans le soutien à autrui. Permettre les guérisons, ouvrir des possibles, explorer l’intelligence collective, donner et garder confiance dans les expériences de la vie… et voilà, au fil des année, une association co-créée qui souhaite ouvrir le dialogue sur les sujets délicats de la vie, à soutenir la parentalité dans la bienveillance et la tolérance des expériences de chacune et chacun… dans le but d’apprendre à accueillir les prochaines générations dans un monde meilleur. On s’aime à travers les grrrrhaines…
L’intelligence collective, la solidarité, la générosité, l’écoute et le dialogue sont autant d’atouts à transmettre à nos enfants pour qu’à leur tour ils puissent faire leurs parts de colibris pour leurs petits. C’est ce que nous offrons chez Graines de Vie… alors si tu en as envie, passe nous rencontrer, propose-nous tes idées, tes besoins, tes utopies et, ensemble, on tentera de leur donner vie !
Merci la Vie
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Agnès Leonetti, d’origine Franco-Portugaise, 48 ans, mariée avec 3 grands enfants, vit à Bienne depuis 16 ans. Elle pratique des accompagnements psycho émotionnels, des massages et analyses de pieds et se forme désormais au métier de Doula. Elle a coorganisé le festival Biennois Biu en Vert l’été dernier ainsi que Perspectiva en 2019.
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Noun Project