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Peindre n’est pas qu’un jeu

Souvenez-vous, il y a 3 ans, les journaux locaux titraient : « Un paradis est en danger, La Maison de la peinture appelle à l’aide ».

Vision 2035 a voulu donner de la voix à ce lieu atypique qui fait de la place aux enfants et a recueilli les propos de Line et d’Yvonne, deux membres actives du comité de l’association.

Toute l’équipe de la Maison de la peinture a réussi son pari : assainir la situation qui reposait sur les épaules du système D. Avec l’aide de la population qui a répondu présente, le bateau n’a pas coulé. Aujourd’hui, le budget est assuré à parts plus ou moins égales entre les « petits » donateur.trices, les abonnements et le soutien de la ville. L’équilibre retrouvé reste fragile. Cependant les idées de développement restent encore nombreuses.

Retour sur une situation de crise

Yvonne : Ce n’était pas possible qu’un espace comme celui-ci meurt dans une ville, qu’on laisse disparaître un lieu pour l’expression libre !

Line : Soit on repensait tout notre concept, soit on laissait tomber. Nous dépensions beaucoup d’énergie pour faire vivre ce lieu et malgré cela les ateliers se vidaient. De plus, les conditions de travail étaient peu claires pour nous tous. Nous, on voulait être là pour les enfants. Offrir ce lieu au service de leur créativité.

Gaia : Vous êtes tous.tes.x bénévoles ? Au comité j’imagine que oui, mais – comment les appelez-vous ? – Les animateurs sont également bénévoles ?

Line : Non, iels sont rémunérés. Ce sont davantage des médiateurs et médiatrices que des animateurs et animatrices. Iels sont là pour faire émerger des idées ou naître des projets.

Yvonne : Pour montrer un chemin, pour réaliser l’idée, l’envie de l’enfant. Proposer des matières. Encourager.

Line : Souvent une idée se transforme, évolue en cours d’atelier. Ce qui est intéressant, c’est que les enfants qui viennent régulièrement, arrivent généralement avec un projet, une idée en tête. Au début, certains ont besoin d’un peu plus d’accompagnement.

L’autonomie en premier plan

Yvonne : Un des aspects importants de la Maison de la peinture, c’est que l’atelier ne vise pas à arriver à un résultat final à emporter à la maison. Notre but, c’est l’expérience créative, les enfants apprennent que c’est un processus.

Line : Le but, c’est le chemin. Et c’est très drôle car les parents ne fonctionnent pas ainsi. La première chose qu’ils demandent en arrivant c’est : « alors qu’est-ce que tu as fait ? », en filigrane « qu’as-tu produit ? ». Nous voulons nous éloigner de cette idée de « production ». Et les enfants spontanément ne sont pas dans cet esprit-là non plus. En éliminant la notion de production, on supprime toute forme de pression.

L’origine de la Maison de la peinture

Gaia : Vous ne vous positionnez pas comme un « Closlieu » qui propose le « jeu de peindre » élaboré par le sémiologue autodidacte Arno Stern. Mais peut-être, si on explique ce qu’est le concept du « jeu de peindre », si on s’informe sur les travaux d’Arno Stern cela fournit une base théorique intéressante pour comprendre les enjeux qui se jouent ici pour les enfants?

Yvonne : Nous ne disons pas « nous sommes un atelier selon Arno Stern ». Cependant nous sommes grandement inspiré.e.s par son travail. La palette des couleurs, le lieu, le non-jugement.

Line : Le Setting imaginé par Arno Stern est bon. En arrivant ici, c’est difficile de ne pas créer quelque chose ! Mais au tout début, la Maison de la peinture a été imaginée et mise sur pied par un artiste biennois : Benedikt Salvisberg. C’est à lui que nous devons cet atelier et nous l’avons développé au fil des années.

Yvonne : L’essence du lieu, c’est un endroit où on peut s’exprimer librement ou même ne rien faire du tout. Et je crois que ça, c’est de moins en moins possible. Les enfants sont sous pression. Et c’est important de leur donner la possibilité de… juste d’être.

Les enjeux pour l’enfance

Line : C’est important de communiquer qu’ici les enfants acquièrent une autonomie, une assurance.

Yvonne : Qu’il y a une philosophie derrière et que tous nos animateurs sont des professionnel.les du domaine artistique et/ou de la médiation. Toute l’équipe fait une grande part de travail bénévole et est passionnée.

Line : Il y a des enfants qui font ici leur première expérience du monde hors cadre familial. Ils apprennent à fonctionner avec les autres tout en se positionnant par rapport à quelque chose qu’ils créent. Ils apprennent les langues, nous sommes bilingues, même multilingues. Ils prennent confiance en eux. Il y a des matinées où on laisse complètement tomber la peinture. Un jour, un enfant a imaginé une tyrolienne dans l’atelier et tout le groupe a participé au « projet tyrolienne ». Nous vivons avec leurs envies, leurs idées et c’est magnifique, ça crée des moments incroyables. On voit aussi l’énorme besoin des enfants, l’énorme demande de ce genre d’activité.

Gaia : Avez-vous l’impression d’offrir un lieu qui contribue à une ville taillée pour les enfants ? Est-ce que c’est ça qui vous motive aussi ?

Line : C’est clair. Si on écoute et on observe les enfants, si on les laisse libres de s’exprimer, de faire ce qu’ils ont besoin de faire, ils se forgent ainsi des outils utiles pour toute la vie : l’autonomie, qui permet de prendre confiance en soi, la socialisation et le travail en équipe, les langues…

L’avenir multicolore

Gaia : Observez-vous des changements ces dernières années dans notre façon de vivre et d’être avec les enfants ? Était-ce une forme de signal le fait d’avoir risqué de devoir fermer ?

Line : En tout cas, cela n’a rien à voir avec l’intérêt des enfants pour la Maison de la peinture. Ce qui a changé, c’est que les enfants vont à l’école dès leurs 4 ans. Nous offrons ce lieu dès 3 ans, donc nous n’avons plus vraiment de « créneau ». Cela a eu une influence sur la fréquentation. Dès qu’on entre à l’école, on est vite dans un système d’horaire, d’école à journée continue. Mais si on observe les enfants, ils n’ont pas moins d’intérêt…

Yvonne : On observe aussi que les enfants ont beaucoup de choses à côté de l’école, il y a la musique, le sport. Ils ont un vrai programme ! Mais ce n’est pas nouveau, cela s’est juste peut-être intensifié.

Line : Ce qui a changé, c’est aussi peut-être que la palette d’activités créatives à la maison a diminué, les jeux pour enfants sont plus directeurs.

Yvonne : C’est aussi rare que l’on puisse peindre ou bricoler à la maison comme on peut le faire à la Maison de la peinture, ne serait-ce que pour des questions d’espace !

Line : Ici tout est possible et l’atelier met à disposition toute une diversité de matériaux pour observer et expérimenter.

Texte : Gaia Renggli, est bibliothécaire, autrice et rédactrice. Elle vit à Bienne avec sa famille.

La Maison de la peinture : infos

Prix d’une carte à 10 entrées: 150.-
Prix d’un atelier d’essai: 5.-

Les locaux peuvent être loués pour divers événements (sortie de bureau, team-building).Pour faire un don : PC 25-3484-2
En plus des dons en espèces, les dons de matériel sont les bienvenus !Horaires des ateliers :
me, je,ve : 9h-11h30 / 14h-16h30
mail@malhaus.ch, www.malhaus.ch

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